plus tu t'approches de la lumière et plus ton ombre grandit.
Quelqu'un de sage a dit un jour "Un grand pouvoir implique... un tas d'emmerdes." Cette personne devait sûrement être un sang-mêlé pour nous définir aussi bien. Je n'ai jamais souhaité être un sang-mêlé. Vraiment pas. Une vie de sang-mêlé, c'est dangereux. C'est angoissant. Et le plus souvent, ça se termine par une mort abominable et douloureuse. Pourtant, aujourd'hui, je serais incapable de voir ma vie autrement.
Avant les monstres et la terreur, avant les Dieux et le reste de ma vie, tout a commencé par un rêve. Le rêve d'un garçon. Celui de voyager, voir le monde et, en l'occurrence... le faire avec un voilier.
Arthur Batson, mon père, était à mon chevet en train de me raconter cette histoire. Son histoire. Celle qui a amené à ma naissance. Je n'avais que six ans à l'époque et j'avais besoin de réponses sur mes origines. Sur ma mère.
« Je naviguais sur l'océan Atlantique, à quelques jours d'être de retour en Amérique. C'est alors qu'une tempête me pris de cours et je tombais en mer. Mes poumons se remplissaient d'eau et je sentais ma fin arrivé... » Mon père. Il n'était clairement pas très doué avec les enfants. Parler de la fois où il a bien failli mourir, avec si peu de tact. Pourtant, je me souviens que j'avalais ses paroles. Je voulais connaitre la suite.
« Lorsque je suis revenue à moi, j'étais allongé sur le pont de mon bateau. La tempête était finie. La mer était calme et elle était là. L'on aurait dit un ange. Je ne me doutais pas à ce moment, qu'elle était bien plus que ça. » Ma curiosité piquée au vif, j'avais de plus en plus de mal à comprendre mon père.
« Bien plus que ça ? » Lui demandais-je sans trop comprendre.
« Elle était... t'as maman. » Il avait hésité sur ces derniers mots. Je comprenais qu'il y avait bien plus derrière toute cette histoire. Et je me demandais surtout comment elle avait fait pour atterrir de nulle part sur le bateau. Cependant, mon père ne dit rien de plus qu'un simple
« Un jour, tout sera plus claire pour toi. » Je me souviens qu'à l'époque, j'étais furieux contre lui.
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J'avais 12 ans. Comme très souvent je me trouvais à l'aquarium de Baltimore. Là où mon père travail. J'aimais beaucoup cet endroit, l'un de mes préféré. L'eau qui m'entourait me calmait et les animaux qui y nageaient étés incroyables à mes yeux. J'attendais que mon père vienne me rejoindre, assis seul sur un banc face à Bob. Bob c'est une tortue de mer. Je l'ai surnommé ainsi parce que... aucune idée, je trouvais ça convenable pour cette tortue.
« Dick. Alors qu'est-ce que tu voulais me demander ? » Je sursautais en entendant la voix de mon père. J'étais tellement perdu dans mes pensées, que je ne l'avais pas vu arriver. Par réflexe, je dissimulais le papier froissé que je tenais, dans mon dos. Mon père le remarqua et il me lançait immédiatement l'un de ces regards insistants dont il avait le secret. Celui auquel je ne pouvais résister. Par conséquent je lui tendis le papier, tête baissée.
« La classe organise une sortie sur un bateau demain... » Je n'osais lever les yeux, sachant que le combat serait perdu dès que je croiserais le regard de mon géniteur. Mais éviter son regard était loin d'être suffisant pour avoir son accord.
« Dick, tu sais très bien ce que je pense de partir en mer... C'est dangereux pour toi. » Je ne comprenais pas. Pour moi, c'était tout simplement égoïste de sa part. Lui qui avait fait le tour du monde sur un voilier, il m'interdisait de m'approcher de la mer. Pourquoi ? Aucune véritable réponse ne m'avait été donner. Seulement un éternel : "un jour tu comprendras".
Je ne cherchais pas à discuter plus longtemps à ce sujet avec mon père. Rien de ce que je dirais ne changerais quoi que ce soit. Seul les actions comptent. C'est pour ça que j'avais déjà prévu à l'avance quoi faire. Signer l'autorisation à la place de mon père et faire cette sortie en mer sans qu'il le sache. Après tout, qu'est-ce qui peut vraiment m'arriver de mal sur un bateau ?
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Le jour où ma vie de sang-mêlé à déboulé. C'était entièrement ma faute. Tout simplement parce que je n'avais pas écouté mon père. Moi, "l'enfant à problème", j'étais changé une fois en plein Océan Atlantique. Exit mon Hyperactivité, j'étais calme et paisible. Et puis elle est sortie de nulle part. Cette fille magnifique un instant et horrible la seconde d'après. Elle n'avait plus rien d'humain. Des cheveux flamboyants, la peau blanche, les yeux rouges, des crocs et une jambe... d'âne ? Je n'avais rien fait, j'étais tranquillement sur le pont du bateau à observer les vagues quand elle m'a interpellé. Je n'ai pas compris ces paroles sur le coup, mais elle semblait humer l'air. Comme si je sentais mauvais. Vraiment pas sympa. Puis voilà qu'elle devient cette horrible créature avec, sans le moindre doute, l'intention de me dévorer ou que sais-je encore. Le pire était que les autres personnes présentes, dont mon prof, ne semblaient même pas la remarquer. De toute façon, la créature semblait n'en vouloir qu'à moi. J'ai donc fait la seule chose que je ne pouvais faire. Je me suis enfuis. Vous avez déjà essayé de fuir sur un bateau ? C'est idiot, il n'y a pas de véritable échappatoire hormis l'océan.
Ma fuite me mena jusqu'à l'arrière du bateau. La vilaine était toujours dans mon dos et j'étais coincé. Je n'avais nulle part où aller. Alors qu'elle avançait doucement vers moi, se délectant de la terreur qu'elle provoquait, je sentais ma fin arrivait.
"Saute ! Va dans l'eau !" Et voilà qu'en plus j'entendais des voix dans ma tête. Sûrement un effet dû au choc d'être sur le point de se faire dévore par un monstre tout droit sortit d'un film d'horreur.
"Viens dans l'eau ! Elle ne pourra rien contre toi, dépêche !" Encore ? Je prenais le risque de lâcher des yeux la créature pour regarder au-dessus de mon épaule. Dans l'eau, il y avait un dauphin. Euh... what ? Je ne comprenais pas, mais comme de toute façon toute cette histoire n'avait aucun sens... je fis ce que j'avais de mieux à faire. Je suis passé par-dessus la rambarde et j'ai plongé dans l'Atlantique. J'entendais derrière moi le monstre hurler, furieuse de perdre ainsi sa proie.
Splash!
Un voile de bulles blanches. Je me suis enfoncé dans les eaux claires et froides, persuadé que j'allais mourir dévorer par un requin déguisé en dauphin. Plus rien n'avait de sens. Ma vie n'avait plus de sens.
Je me laissais tomber lentement sous l'eau jusqu'à ce que le Dauphin apparaisse devant moi. Il me parla dans un cliquetis et une voix raisonna dans ma tête en même temps :
"Tu es en sécurité maintenant." J'ai alors pris conscience d'un certain nombre de choses importantes. La première : C'était le Dauphin que j'entendais dans ma tête. J'étais capable de le comprendre, je ne sais trop comment. La seconde chose était encore bien plus incroyable. Je n'étais pas mouillé. Certes, je sentais que l'eau était fraîche. Mais lorsque je touchais mon tee-shirt, il était parfaitement sec. C'était comme si mon corps tout entier était entouré d'une fine couche d'air. Et c'est donc là que le détail le plus étrange frappa mon esprit. Je respirais. J'étais sous-l'eau, mais je respirais normalement.
« Comment est-ce que... c'est possible... ? » Des clics et sifflements de sonar retentirent à nouveau du Dauphin, alors que la traduction se faisait dans ma tête :
"Suis-moi Demi-dieux. Je vais t'emmener en sécurité". Demi-dieux ? Ouais pourquoi pas. Aux yeux d'un dauphin je pouvais tout à fait paraître pour une personne divine. Je n'avais plus rien à perdre au point où j'en étais. J'ai donc choisi de le suivre.
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« Tu n'as pas ta place ici fils de la mer. » Une mauvaise blague. Voilà ce à quoi je pensais. Qu'un Dauphin m'emmène à un camp d'hommes-poissons sous l'océan, ok. Qu'un homme-poisson-cheval me dit que les Dieux de la mythologie existent toujours aujourd'hui et que je suis l'enfant de l'un d'entre eux, pourquoi pas. Qu'une loupiote avec le symbole d'un poisson ou je ne sais quoi apparaît au-dessus de ma tête, passe encore. Mais qu'on me dit que je n'ai pas ma place sous l'océan après m'avoir annoncé que ma mère était la déesse de, et bien, la mer... non là je commençais vraiment à croire que l'on voulait juste se pailler ma tête.
« Dans ce cas où est-ce que je peux aller ? Vous l'avez dit vous-même, les monstres ne cesseront pas de me pourchasser et je risque de mettre mon père en danger. » J'étais frustré, désorienté, un tas d'informations se bousculaient dans ma tête et le pire, c'est que je commençais à être affamé. J'aurais bien collé mon poings dans le nez de l'homme-poisson/cheval... s'il n'était pas une montagne de muscles.
« Il existe un autre camp. Il est à la surfasse, tenu par mon cousin Chiron. C'est là-bas que tu dois aller. Un hippocampe va t'y emmener. » "Un hippocampe va t'y emmener". Si l'on m'avait dit que j'entendrais cette phrase un jour, j'aurais sans doute ri à m'en faire pipi dessus. La créature - l'hippocampe - n'avait rien du petit animal que j'avais vue dans les livres ou à l'aquarium. C'était plutôt une sorte de créature mi-cheval à l'avant et mi-poisson à l'arrière. Suffisamment grand pour que je puisse monter sur son dos et me laisser entraîner dans les courants marins.
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Voilà déjà 6 ans que je suis arrivé à la colonie des sang-mêlé. Maintenant j'ai 18 ans et l'époque où je débarquais sur la plage de la colonie, complètement perdu était bien loin derrière moi. Loin le temps où je voyais Chiron pour la première fois, où je regardais la vidéo de présentation qui me confirmait les dires de l'Ichthyocentaure (dois-je vous préciser que je préfère le terme "homme poisson/cheval ?). Je me souviens encore de la discutions que j'avais eu avec mon père à travers un arc-en-ciel. Mon père que je vois de moins en moins depuis qu'il s'est marié. Et il me serait impossible d'oublier Nora me faisant visiter la colonie. Beaucoup de choses avaient changé depuis cette époque. Evidemment, avec le temps j'étais devenu plus grand, mais aussi plus fort et plus habile. Le combat et les monstres ne me faisaient plus peur, bien au contraire. Je comprenais beaucoup mieux le monde qui m'entoure et en prime j'avais des amis.
Je n'avais malheureusement (ou pas) jamais eu l'occasion de participer à une quête. Ce n'est pas pour autant, que je n'ai pas vécue d'aventures trépidantes et dangereuses. Le plus bel exemple c'est produit alors que j'étais à la colonie depuis deux ans déjà. Je me trouvais chez mon père à Baltimore, je suis tombé sur une demi-déesse attaqué par un monstre. J'ai donc joué les héros. Je l'ai sauvé, protégé et emmené à la colonie. Une petite histoire qui peut paraître banal, mais qui m'a beaucoup fait évoluer. Surtout, car en cours de route j'ai bien failli perdre la vie. Quelle fut la joie de tomber en chemin sur l'illustre Lion de Némée... Le monstre m'avait lacéré le bras et sans ambroisie j'aurais sans aucun doute perdu ce dernier. Je n'ai pas été capable de vaincre le Lion, mais nous avons réussi à lui échapper. Tout cela ne vaut peut-être pas une véritable quête, mais je prends l'action où je le peux. Les choses changeront peut-être un jour. Je l'espère.